Qui ? Quoi ? Quand ? Où ?
Récit
Pour qui s’adapte-t-on ?
La question devrait être première, toujours.
Pour tout le monde évidemment.
Mais tout le monde n’est pas armé de la même manière face aux risques, et particulièrement face au risque de surchauffe urbaine, risque le plus mortel aujourd'hui en Europe. La précarité climatique dépend du milieu physique mais aussi du milieu social et de notre propre état physique.
S’adapter, c’est donc rééquilibrer les inégalités climatiques car un aménagement n’est jamais neutre : il inclut ou il exclut. Cela suppose de connaître finement les situations de vie, les besoins réels, les fragilités du quotidien…
Mais à quoi s’adapte-t-on ?
À un seul risque ? À tous les risques ?
A la chaleur en ville bien sûr. Mais aussi à la sécheresse, aux pluies violentes, aux tensions sur les ressources, aux inégalités accrues...
Face à des menaces plurielles, nos réponses doivent être transversales.
Une rue végétalisée ne doit pas seulement rafraîchir : elle doit absorber l’eau, atténuer le bruit, accueillir le vivant, créer du lien entre les habitants.
Chaque solution doit porter en elle des co-bénéfices, pour être durable et résiliente.
Mais pour cela, il faut connaître nos territoires avec précision : leurs sols, leurs flux, leurs usages…
Pour quand s’adapte-t-on ?
À quelle temporalité répondre ? S’adapter à 2050, est-ce suffisant ? Est-ce responsable?
Quand la TRACC annonce +2,7°C en 2050 et +4°C en 2100, on ne parle plus des mêmes climats, des mêmes villes, des mêmes modes d’habiter.
Les solutions adaptées à 2050 seront peut-être, voire sûrement obsolètes en 2100. Et pourtant, ce que l’on construit aujourd’hui restera demain.
Alors de quel futur voulons-nous être les aménageurs ? Osons penser plus loin, anticipons la suite.
Et où s’adapte-t-on ?
À quelle échelle ? Et comment les échelles se répondent-elles ?
Penser l’adaptation, c’est penser en emboîtements, entre le local et le global, entre l’invisible et le tangible.
Un bâtiment ventilé naturellement ne suffit pas si l’air chaud stagne autour de lui ; une rue fraîche n’a plus d’effet si, quelques mètres plus haut, les climatiseurs rejettent leur chaleur.
Aucune échelle ne peut être pensée seule : territoires, quartiers, espaces publics, bâtiments, usagers doivent dialoguer.
Sinon, chaque solution devient un îlot isolé dans un système qui continue à surchauffer.
Contribution
Issue du livre "Les 101 Mots de l'Adaptation, à l'usage de tous", sous la direction de l'Atelier Franck Boutté
Titre
Qui ? Quoi ? Quand ? Où ?
Auteure
Léna Savoldelli, cheffe de projets à l'Atelier Franck Boutté
Éditeur
Archibooks
Date de publication
2025
Pages
176 pages
Illustration
Sébastien Hascoët