Confort thermique

Narrative

251205 adaptations Le confort thermique

Dans l’adaptation des territoires au réchauffement climatique, le “confort thermique” est un enjeu de première importance. Il est aujourd’hui au cœur des préoccupations en aménagement, bien que l’emploi du terme demeure souvent imprécis : tantôt utilisé pour désigner des problématiques connexes, comme le ressenti thermique ou les risques sanitaires, tantôt évoqué à tort comme une conséquence de la réduction de l’“îlot de chaleur urbain”.

Ces glissements sémantiques sont favorisés par la complexité du concept, qui recouvre plusieurs approches et définitions. Sur le plan fonctionnel, le confort thermique est l’un des déterminants du bien-être de l’individu, influençant la fréquentation des espaces urbains selon leurs conditions microclimatiques. Sur le plan psychologique, il est défini par la norme ANSI/ASHRAE 55 (2020) comme l’état d’esprit exprimant la satisfaction ressentie vis-à-vis de l’environnement thermique. Enfin, sur le plan thermophysiologique, il correspond à la neutralité thermique, dans laquelle le corps parvient à dissiper l’excès de chaleur produit par son métabolisme. Cet équilibre dépend de caractéristiques individuelles (âge, sexe, morphologie, niveau d’activité, type de vêtements) et de paramètres environnementaux (température de l’air, humidité, ventilation, irradiation). C’est l’une des distinctions avec l’îlot de chaleur, qui est peu représentatif du ressenti thermique, se limitant à l’analyse de la seule température de l’air. Ainsi, dans une situation caniculaire, le ressenti thermique peut être meilleur dans un endroit où l’air est plus chaud qu’ailleurs si les autres paramètres microclimatiques y sont plus favorables.

Pour objectiver le ressenti, plus de 200 indicateurs de confort thermique existent, tels que l’UTCI ou le PET, qui traduisent en réalité la perception thermique : la zone de « confort » ne représentant que la plage correspondant au meilleur ressenti d’un individu. Ainsi, dans les climats chauds, « améliorer le confort » revient en pratique à réduire la valeur de ces indicateurs, puisque leur augmentation traduit une intensification de la sensation de chaleur.

De plus, la problématique du confort thermique pourrait être réduite à une approche binaire — soit je suis confortable, soit je ne le suis pas. Or, dans la pratique, lorsqu’une collectivité ou un aménageur commande une étude de confort thermique, notamment lors de vagues de chaleur où le confort ne sera pas atteint, ce qu’ils attendent est en réalité une analyse plus fine, correspondant à l’évaluation du ressenti thermique dans toutes ses nuances : cartographie des niveaux de stress dans l’espace, identification des zones critiques du patrimoine urbain existant, et quantification de l’atténuation du stress thermique des habitants par les projets urbains à réaliser. Ces démarches visent également à identifier les zones présentant un risque sanitaire, même si le ressenti thermique n’a pas été conçu pour quantifier ce risque.

En conclusion, même si le terme est mal employé, les démarches regroupées sous l’étiquette de « confort thermique » — extension des zones de confort, réduction du stress thermique, limitation des risques sanitaires — restent indispensables pour l’adaptation des villes. En effet, la dégradation du ressenti extérieur déclenche un effet domino en boucle : l’aggravation des conditions microclimatiques pousse les habitants à se retirer à l’intérieur, où le recours accru à la climatisation rejette de la chaleur vers l’extérieur, aggravant encore davantage les conditions microclimatiques. C’est pourquoi améliorer le ressenti thermique dans les espaces publics constitue une priorité pour préserver la vivabilité des villes, tout en limitant les facteurs anthropiques qui accentuent la surchauffe urbaine.

  • Contribution

    Issue du livre "Les 101 Mots de l'Adaptation, à l'usage de tous", sous la direction de l'Atelier Franck Boutté

  • Titre

    Confort thermique

  • Auteur

    Matteo Migliari, expert référent en biométéorologie et microclimatologie urbaine à l'Atelier Franck Boutté

  • Éditeur

    Archibooks

  • Date de publication

    2025

  • Pages

    176 pages

  • Illustration

    Sébastien Hascoët